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1 juillet 2010 4 01 /07 /juillet /2010 09:28

N° 19 Histoire des Rois khmers : Règne de Sdach Khân (1512-1525) : La sécession.

 Parlons de Samdech Chanreachea. Il décida de changer le nom de la province Akmarakkirboribour  en Baribour (Abondance) (dans la province de Pursat actuelle). Pendant la cérémonie d’attribution des charges aux dignitaires du Royaume, on voyait apparaître dans le ciel bleu de la nouvelle capitale royale, un arc-en-ciel de sept couleurs. C’était un phénomène rarissime. Chanreachea convoqua donc un divin du palais pour en interpréter. Celui-ci dit à son souverain ceci devant les sept brahmanes, conseillers du Roi :

 « À partir de ce jour-ci, Votre Majesté est identifié par tous les dieux comme un souverain puissant, parce que l’apparition de l’arc-en-ciel est un signe de cette légitimation. Quant aux sept couleurs, elles représentent les sept étapes de votre vie, c’est-à-dire le chemin de votre destin majestueux :

 1. Ô Mon Roi, avant la grossesse, votre Samdech mère avait fait un beau rêve, dans lequel elle voit une éclipse de lune ;    

2. Ô Mon Roi, le jour où vous êtes venu au monde terrestre par la volonté du dieu céleste pour le règne de l’Ame et le salut de toutes les créatures, ce jour-là, il y a eu l’éclipse de lune ;    

3. Ô Mon Roi, ainsi, Votre Roi père vous avait donné un nom  « Lune » ;

4. Ô Mon Roi, quand Votre Auguste père était en guerre contre les ennemis de la maison royale, appelés « l’armée de Dragon » qui est aussi vos ennemis d’aujourd’hui, il avait fait un rêve : Il voit un Dragon qui crache le feu pour brûler son quartier général de campagne. Au moment où votre Auguste père se précipite pour poursuivre la bête, il voit apparaître l’âme de son Auguste père venant le monde au-delà pour lui dire qu’il cesse de combattre inutilement ce dragon, parce qu’il s’effondra à la première apparition de la lune dans le ciel de l’Ouest du Royaume. Comme vous le savez, vous venez du Siam qui se trouve à l’Ouest du pays, vous êtes donc la lune de l’Ouest qui apparaît dans les cieux du Kampuchéa pour faire périr le dragon qui n’est que Kan, votre ennemi du moment ;

5. Ô Mon Roi, Vous êtes la fraîcheur de la nuit pour le peuple en colère contre l’imposteur ayant l’intelligence du tigre. Votre royal nom « Lune » n’est que la preuve de cette fraîcheur ;

6. Ô Mon Roi, depuis votre retour au pays, le peuple vous suit comme l’ombre suit le corps partout où il va. Vous êtes l’ombre éternel du peuple ;

7. Ô Mon Roi, l’apparition de l’arc-en-ciel dans le ciel bleu d’aujourd’hui est une manifestation divine qui de dieux qui viennent vous faire connaître d’une manière expresse leurs intentions de vous élever au rang du grand roi.

 Samdech Chanreachéa étant satisfait de ces propos, il donna des récompenses au divin pour ses explications. Après quoi, les sept brahmanes avaient oint d’huile au corps du Roi pour que l’annonce du devin devienne une réalité pour le souverain.

 Quelque temps après, on informa le Roi que la rivière qui traversait la ville était sec. Le roi emmena avec lui quelques ingénieurs hydrauliques pour visiter la source de ce cours d’eau. Arrivé sur la place, il constatait que le lit de la rivière était bouché par un arbre tombé par terre. Cet engorgement faisait changer l’écoulement d’eau vers le Nord. Le Roi ordonna aux services des travaux publics de déblayer l’arbre afin que la rivière rentrait dans son lit habituel. Il fit construire en plus un petit barrage en pierre pour empêcher définitivement l’eau de couler vers le nord.

 Parlons des deux femmes, nommées Em et Aing. Elles étaient enceintes et trompaient leur mari, nommés Lous et Som. Un jour, ces deux bonnes femmes décidaient de tuer leur mari par leur amant, nommés Kao et Keing. Elles tendaient un piège à leur époux à l’endroit où le Roi fit construire le barrage. Les amants avaient réussi à tuer les deux maris comme dans leur plan, mais au cours de leur lutte corps à corps, ils détruisirent involontairement le barrage du roi. Cette destruction provoquait le changement de la direction des cours de la rivière. Le Roi ordonna à la police de faire une enquête pour trouver les coupables de ce dégât. Après cette enquête, les deux femmes et les deux amants furent arrêtés et condamnés à la peine capitale par le Roi. Ils furent enterrés vivants à côté du barrage. D’après la légende, les six âmes, deux femmes, deux amants et deux fœtus, hantaient cet endroit et protégeaient ce barrage. Au fil des années, cette source d’eau donnait de plus en plus d’eau qui transformait le lit de la rivière en une voie fluviale navigable pour toutes les tailles de bateaux de transport de marchandises. Ces activités fluviales transformaient la ville Baribo en une grande ville commerciale. La population appelait cette ville le « marché d’abondance » (Psar Baribo). Elle demeure jusqu’à aujourd’hui.

 En 1517, le Roi Chanreachéa entreprit une vaste campagne de guerre de propagande dans le territoire d’ennemi, afin de rallier les gouverneurs, les fonctionnaires, les populations et les esclaves. Cet appel fut entendu par les populations.

 Revenons au Sdach Kân. Dans sa capitale Sralap Pichay Prey Norkor[1](1), pendant la saison des pluies, l’année de bœuf, il décida de lancer une offensive contre l’armée de Preah chanreachea. Il décida de rassembler en Conseil de guerre tous les grands dignitaires civils et militaires, afin d’avoir leur opinion sur la question.  Après quoi, il ordonna aux généraux de mobiliser une armée de 120 000 hommes. Une fois faite, Kân se consacra à la répartition des tâches :  Chao Ponhea Lompaig emmena une armée d’avant-garde de 20 000 hommes à Samrong Taung. Ensuite, il confia à Samdech Chao Fa Kao, son oncle, le commandement d’une armée de 30 000 homme pour aller s’installer à Phnom-Penh.

 Chanreachéa fut immédiatement informé des intentions de Kân. Il se mit en colère car, cet imposteur ne respectait pas l’accord de trêve, dans lequel il était clair que pendant la saison de pluie, les deux parties belligérantes devaient se faire taire leurs armes pour laisser la population faisait pousser le riz. Pour riposter à cette offensive, il marcha à la tête d’une armée à la rencontre des assaillants. Il confia à Okgna Chakrey Keo et à Okgna Vongsar Atakareach Key le commandement de l’avant-garde de 20 000 hommes, lui-même conservant le commandement du centre de 30 000 hommes. Il quitta sa capitale pour emmener ses troubles camper à Chay Sour, situé dans la province de Longveak.

 Arrivé à Samrong Taung, Key lança une attaque de front contre la division de Lompaing selon le plan arrêté. Cette attaque fut soutenu par les troupes du général Okgna Norin Niryourk. Cette unité possédait 140 éléphants.  Norin Niryouk attaqua Lompaing par derrière. Au milieu des ennemis, Lompaing ne perdait pas son sang froid, il organisa énergiquement les contres attaques avec courage. Mais, après quelques heures de combat, son arrière garde s’effondra face à des assauts des éléphants. Vu le danger, Lompaing ordonna à son adjoint opérationnel, Ponhea Sral, de sonner la retraite. Pour fuir le danger, Lompaing fut allé se retirer avec ses troupes à Phnom-Penh. Ils furent poursuivis par les soldats de Key jusqu’à la porte de cette ville. Mais, au lieu d’attaquer la citadelle où Lompaing se réfugiait, Key la contourna pour attaquer des points importants d’ennemis tout au long de la rive Est du fleuve du Mékong et jusqu’à la province de Trang (Soc Trang au Viêtnam actuel) et ouvrir la voix aux bateaux de guerre depuis Cheung Eak jusqu’à la mer. Cette action était stratégique, car elle permettait à Chanreachea d’avoir une ouverture vers l’océan pour les activités commerciales et les opérations militaires. La défaite de Lompaing encouragea la désertion de beaucoup de gouverneurs de Kân au profit de Chanreachea, comme les gouverneurs de Bati, Prey Kabas, Kandal Steug, Kaung Pisey, Phnom Srouch, Bantey Meas, Peam, Sré Ronaung, Cheuk Kach chom. Avec la grâce de Chanreachea, ces gouverneurs continuèrent d’occuper leurs charges de gouverneur, mais ils travaillèrent cette fois-ci contre leur ancien maître de leur vie. Cependant les autres gouverneurs de cette région, comme les gouverneurs de Bassac, Preah Trapaig, Kramoun Sar et Euv Mao se manifestèrent davantage leurs agressivités contre Chanreachea .

 Après cette victoire, Preah chanreachea demeurait dans son quartier général à Longveak.  Il assista à la fête des « courses de pirogues » et de « manger du paddy écrasé au pilon » à Kompong Sèth. Pendant cette fête, à la nuit tombée, on fit tirer les feux d’artifices pour amuser la population et sur le fleuve on organisa le défilé des pirogues ornées des lanternes lumineuses de toutes les formes. Les festivités duraient pendant trois jours et trois nuits. Pour laisser les traces de son passage dans les communes de Jayso où il avait installé son quartier général pendant la campagne militaire et Kompong Seth où il avait assisté la fête des courses de pirogues, Chanreachea décida de changer les noms de ces deux lieux : Jayso devint « Sorivong » et Kompong Seth devint « Kompong Prasat ». Ces deux noms continuèrent d’exister jusqu’à aujourd’hui. Quelque temps après, Chanreachea décida de reprendre l’offensive contre la position d’ennemi. Il ordonna aux Okgna Chakrey Keo, Vongsa Akareach et Kralahom Kam d’attaquer la citadelle de Phnom-Penh avec 30 000 hommes. Cette citadelle était défendue par des hommes téméraires de Kân, tels que Samdech Chaofa Kao, Chao Ponhea Lompaing, Sral, Dekchau (gouverneur de Samrong Taug, et Chao Ponhea Reachea Métrey (gouverneur de Phnom-Penh). Pendant plusieurs mois de batailles, les armées des deux côtés ne s’étaient pas affaiblies. Tantôt l’armée de l’Est prenait des avantages sur celle de l’Ouest, mais le lendemain, la situation aura été inverse. La perte élevée des hommes commençait à faire sentir dans les deux camps. À la première pluie de la mousson, Chanreachea et Khan acceptèrent sans hésitation la trêve pour laisser la population de cultiver du riz.

 Quelque temps plus tard, Chanreachea convoqua les membres de son Conseil de guerre pour leur dit ceci : « Voilà plusieurs fois que nous attaquons la citadelle de Phnom-Penh, mais sans avoir remporté aucune victoire. À mon avis, il faut convenir que nos ennemis sont habiles. Ils savent toujours profiter de notre faiblesse pour repousser nos assauts. La citadelle de Phnom-Penh est imprenable. Qu’on me donne le nom du monarque de l’Ouest ; en fait, ce n’est pas tout à fait exact, parce que Phnom-Penh, Kompong Som et une grande partie de Kampot sont encore sous le contrôle de AKhan. Si AKhan tient Phnom-Penh, il contrôle automatiquement Kompong Som et Kampot. Il faut faire tomber Phnom-Penh par la ruse. Voici ce dont il s’agit : Provoquer nos ennemis par la ruse pour qu’ils sortent de Phnom-Penh pour nous attaquer en masse, mais en plusieurs endroits à la fois. Qu’ils osent sortir de leur fort à une condition qu’ils aient une assurance de gagner la bataille. Il y aurait un moyen pour y parvenir : Faire semblant d’être vulnérables devant leurs assauts. Le simulacre de débandade de nos troubles serait en effet notre procédé.

 Le 18 décembre de l’année de tigre, Chanreachea ordonna au Général Peuv, coordinateur général du plan de lancer la campagne militaire : Les divisions du Général Chakrey et Vongsa Angreach. attaquèrent Phnom-Penh. Le chef de la commanderie de cette ville, Chao Fa Kao répondit comme l’habitude par une contre-attaque : Il inonda les ennemis d’une pluie de flèches et des tirs de canons. Ensuite il lança ses troupes cuirassés pour repousser les attaques des soldats de l’Ouest. Cette méthode de défense permettait à Chao Fa Kao de repousser plusieurs d’assaut successif des soldats adverses au cours de ces derniers mois. Cette fois-ci, en haut du rempart de la citadelle, Chao Fa Kao observa que la retraite d’ennemis ressemble plutôt à une débandade généralisée. Les soldats n’écoutaient plus leurs officiers : Ils se battaient en retrait quand on leur ordonnait à maintenir la position. La confusion fut total dans les rangs des troupes de l’Ouest. Pour Chao Fa Kao, ce beau spectacle de calamité d’ennemis fut une victoire annoncée. Il ordonna donc au valeureux Colonel qui commandait la cavalerie de chasse de 2 000 cavaliers cuirassés de poursuivre la fuite des soldats de l’Ouest. Cette cavalerie fut soutenue par les troupes transportées par des chars de guerre pour anéantir les ennemis en fuite. Arrivée à O Phôr, la cavalerie de Kân livra un combat singulier à la garnison d’ennemis. Le combat ne dura pas même dix minutes : Les soldats de l’Ouest abandonnèrent leur position dans le désordre total. Cette situation encourageait les troupes de l’Est à poursuivre leur progression dans le territoire d’ennemi. Vu l’arrivée des soldats de Kân en liesse, le Général Kralahom de l’Ouest, commandant de la citadelle d’Oudong quitta la ville avec ses troupes sans livrer la bataille contre les ennemis. À partir de cette ville, les troupes de Kân poursuivirent les ennemis en deux directions différentes : La direction de Chroy Paunlear et celle de Prek TaTeang.

 Cette manœuvre insidieuse poussa les troupes de Kân à la faute. Ce qui devait arriver, arriva : À Dambauk Mean Leak, le Général Kralahom ordonna à ses troupes de faire demi-tour pour livrer un combat aux chasseurs de Kân. Presque simultanément à Prek Pneuv, les soldats, conduits par So et Kaing, que Chanreachea avait embusqués de toutes parts sortirent de leur cache afin de surprendre les soldats de l’Est par leurs flancs. Quant au Général Tep de l’Ouest, il ordonna à ses fantassins d’attaquer à revers la deuxième colonne des troupes de Kân dont les soldats s’étaient déjà fatigués par la marche rapide pour poursuivre le simulacre de fuite des ennemis. Cette attaque surprise bloqua l’avance ennemie dans le bourg de Prek Tateang. Elle constituait l’essence de la frappe des soldats de Chanreachea. Dans ces batailles celui-ci mobilisa 20 000 hommes et il confia le commandement au Général Prom, un prodige qui savait insuffler du courage à ses troupes dont le succès couvre de honte aux généraux de Kan.         

 Retournons maintenant à Phnom-Penh. Après le départ de ses troupes d’élites de la citadelle pour poursuivre les ennemis en fuite, Samdech Chao Fa Kao chercha de son côté à exploiter cet avantage inattendu. Depuis quelques jours déjà, les agents de renseignement militaire lui informèrent que la flotte de Chanreachea à Chroy Chanvar était en nombre inférieur par rapport à sa flotte. Pour Chao Fa Kao, la retraite d’infanterie pédestre de Chanreachea de la porte de Phnom-Penh laissa sans doute la base navale de Chroy Chanvar sans défense. La vue de la victoire personnel est un appât séducteur pour un homme avide d’honneurs qui ne raisonne pas. Il décida donc de lancer sa flotte de 60 bateaux pour attaquer la base d’ennemi sans avoir pris de précaution pour empêcher l’effet des embuscades que ces derniers pourraient former. Il laissait deux de ses officiers supérieurs, Lompaing et Vieng à garder la citadelle. Apprenant l’arrivée des bateaux de guerre d’ennemis, les commandants de base de Chroy Chanvar, Vibol Reach et Pratest Reach firent sortir leurs bateaux pour riposter à cette attaque. La bataille navale entre les flottes offrit un beau spectacle pour la population de Phnom-Penh. Mais après une demi-heure de lutte, Vibol Reach ordonna à sa flotte de battre en retraite selon le plan arrêté. Vu ce décrochement, Kao ordonna à ses chefs de flottille de poursuivre les ennemis. Arrivé à Prek Pneuv, Kao fut surpris par des pluies de flèches et des tirs de canons venant des deux rives. Le Général Tep était le responsable de cette embuscade mortelle. N’ayant pas le plan B pour agir contre cet imprévu, Kao laissa son destin à la main du Bouddha. Il enleva son uniforme d’Amiral et sauta dans l’eau pour s’enfuir. Étant un bon nageur, Kao put arriver à Basane (Prek Por). Là-bas, il rassembla le débris de ses troupes en déroute pour reconstituer son armée.

 Revenons à Phnom-Penh, après la sortie de Kao avec sa flotte, la disposition de défense de la citadelle de cette ville fut affaiblie. Selon le plan arrêté, Chanreachea ordonna aux unités de grimpeurs des murs de livrer la bataille. L’objectif était de brûler les palissades de la citadelle. Lompaing et Vieng n’avaient pas assez d’hommes pour repousser les assaillants. Ils finissent par abandonner leur poste en quittant la citadelle par bateau. Ils furent captés et tués par les troupes de l’Ouest. Le bilan de cette prise de la citadelle de Phnom-Penh était juteux pour Chanreachea : Plusieurs tonnes de riz et beaucoup de matériel de guerre abandonnés par les ennemis, 85 officiers supérieurs capturés. Chanreachea ordonna immédiatement de tuer 35 pour crime de haute trahison et 50 autres étaient condamnés de peine d’esclavage pour toute leur vie. À peine avait-il fini de donner les ordres, on entendit la voix du héraut proclamant les noms de ceux que le roi les avait condamnés à mort. Ces prisonniers étaient traînés et furent attachés et tués. Puis tous les cadavres furent traînés hors de la citadelle. La chute de Phnom-Penh permit à Chanreachea de libérer plusieurs provinces : Phnom-Penh, Samrong Taung, Bati, Tran, Kampot, Kampong Som. Mais son offensive fut repoussée au Sud-Est par Chao Ponhea Pisnolauk, le Grand général de l’armée de l’Est. Ce général contrôlait un vaste territoire : les provinces de Bassac, Preah Trapeang, Kramoun Sar et Euv Mao.

 Kan fut informé de cette défaite, laquelle lui rebutait. Il traita en effet ses généraux de petites têtes devant ses conseillers. Dans la bouche de Kan, cette insulte reviendra comme une antienne pendant les années à venir : « Combien il est nécessaire d’user de prudence en suivant un ennemi qui fuit. Comment avaient-ils osé de changer la stratégie de défense de la ville pour une petite ruse de rien du tout de Chaneachea. Et pourtant dans nos règlements militaires, les commandants d’unités ne font rien sans délibération préalable, rien d’improvisé ; la réflexion précède toujours l’action et les actes se conforment aux décisions. Je blâme toujours à ceux qui risquent une attaque, dont les suites désavantageuses peuvent être plus nuisibles que le succès n’en peut être utile ; car on ne saurait mettre en balance un médiocre avantage contre une ruine totale ». Ensuite, il ajouta : « Chanreachea mérite bien de mourir par assassinat comme son feu frère, roi Sokunbât. S’il mourait, son armée s’effondra. Actuellement, Chanreachea fait appel à nos soldats de déserter pour rejoindre son camp. Il soit confiant en lui d’accepter les transfuges de travailler pour sa victoire. Il faut donc chercher 100 volontaires, parmi nos hommes de confiance pour s’infiltrer dans son camp. Après quoi, ils profiteront le moment de défaillance dans la sécurité de Chanreachea pour le tuer comme nous avons tué son frère. Je crois que ce plan puisse encore réussir. Il suffit de bien le monter et personne ne doit être dans la confidence de ce projet, ni au Palais, ni aux Grands dignitaires ».

 Quelque temps plus tard, les conseillers informait Kan que les 100 volontaires étaient trouvés. Kan étant très content, il nomma son neveu, fils d’une tante maternelle, chef des 100 braves ayant les âmes fortes. Il dit à ses conseillers qu’il a choisi son neveu, parce que ce dernier ne compte pas à remplir ses devoirs, mais de se battre pour la gloire de sa famille.  Ces 101 téméraires parvenaient à s’intégrer dans la garde prétorienne de Chanreachea. Ils suivaient le Roi dans tous ses placements.

 Au mois d’avril 1519, année du lièvre, au cours d’une baignade habituelle, Chanreachea avait de doute sur du comportement de certains de ses gardes approchés, parce qu’ils se baignaient avec leur sarong. Il quitta le bassin d’eau pour se reposer sous un grand arbre. Après quoi, il ordonna à tous ceux qui se baigner à côté de lui d’enlever immédiatement leur Sarong, parce qu’il soupçonnait qu’ils cachassent les armes sous leur sarong. Le neveu de Kan et ses compagnons se sentaient mal à l’aise. Il fallait agir maintenant, sinon leur plan aura découvert par le roi. Il donna signale à ses hommes de se diriger vers l’endroit où le roi se trouvait. Arrivé à cet endroit, il demanda aux gardes de corps du roi d’une audience royale pour une affaire de haute importante. Les gardes de corps n’avaient même pas le temps d’en informer le roi, ils furent bousculés par les membres de commando de Kan. Ces derniers se ruèrent vers le roi. Ayant aperçu de loin l’arrivée des saillants, le roi saisit son épée et alla en avant pour les attaquer en tuant plusieurs personnes. Les valets et les fonctionnaires se précipitèrent à arracher les pieux pour riposter l’attaque des traîtres. En quelques secondes seulement, les bords de l’eau calme se transformèrent en champ de bataille. Les gardes de corps et autres soldats fidèles au roi arrivèrent sur lieux et massacrèrent les membres de commando de Kan un par un. Ces derniers battirent en retraite et s’enfuirent dans la forêt en laissant 35 corps de leurs camarades sur place et plusieurs autres furent capturés. Les morts et les vivants furent décapités par ordre de Chanreachea. Leurs têtes furent exposées sur la place publique pour l’exemple.

 Quelque temps plus tard, Preah Chanreachea ordonna au ministre de la guerre de consolider les armées par les moyens suivants : Chercher des bois pour construire des bateaux et des pirogues de guerre ; créer un corps des forgerons pour fabriquer des lances, des sabres de diverses tailles, des phkā’ks[2] (2),  des couteaux et coutelas de toutes dimensions, des fusils et des canons ; créer un corps des artisans spécialisés dans la fabrication des chars de guerre et de transport, des arcs, des arbalète, des balistes sur roues, des flèches, des carquois et des boucliers ; acheter des chevaux pour renforcer la cavalerie, capturer et acheter des éléphants au Laos pour développer les unités des éléphants. Pendant la saison de pluie, il renvoyait les soldats chez eux pour aider leur famille à cultiver le riz. Dans cette année-là, la culture du riz était 5 à 6 fois supérieure par rapport aux autres années.

 Il éleva une de ses épouses, née des parents de sang royal, au rang de reine. Elle porta le nom de sacre, Samdech Preah Phãkvatey Ksatrey Sirich Chakrapath. Il créa des rangs pour les femmes de son harem : Ek (Premier rang), Tŭ (Deuxième), Trey (Quatrième rang) et Chhatva (Quatrième rang).

 Du côté de Sdach Kan, il procéda à remplacer les Hauts dignitaires et des généraux qui étaient morts dans le champ d’honneur, de maladie et de vieillesse par les nouveaux qui étaient membres de sa famille :

 - Prom, nommé Chao Ponhea Vieng, Ministre de la Justice ;

- Chum, nommé Chao Ponhea Veing, Ministre du Palais ;

- Chaut, nommé Chao Ponhea Sral, Ministre de la Mer ;

- Penh, nommé Chao Ponhea Lompaing, Ministre des Armées.

 Ces nominations furent informées à tous les gouverneurs de province sous son contrôle. Il leva une armée de 80 000 hommes pour reconquérir les territoires de l’Ouest. Il confia la garde de sa capitale royale à son oncle Kao. L’armée de campagne fut organisée de façon suivante :

 - Chao Ponhea Veing (Prom) commanda une armée d’avant garde de 15 000 hommes,

- Chao Ponhea Lompaing (Penh) commanda une armée de gauche de 10 000 hommes,

- Chao Ponhea Yothear Thipadey Noun commanda une armée de droite de 10 000 hommes,

- Chao Ponhea Moha Séna Toun commanda une armée d’arrière garde de 10 000 hommes.

- Kan commanda une armée du centre de 20 000 hommes,

- Une flotte de 300 bateaux et pirogues de guerre. Elle avait pour base à Prek Por.

 Kan s’établit son quartier général à la commune de Mouth Kmong dans la province de Thaung Khum. Après quoi, il ordonna à Prom et Penh d’attaquer la citadelle de Kompong Siem. Ayant appris le mouvement des troupes de l’Est par sa garde provinciale, le gouverneur de Kompong Siem envoya un messager pour en informer son roi. Celui-ci ordonna à ses deux officiers Chim et Ko d’emmener sa famille et celle des membres de sa cour à Pursat pour les mettre en sécurité. Après quoi, à la tête de 50 000 hommes, il partit pour secourir son gouverneur. Son armée de campagne s’organisait de façon suivante :

 - Une flotte de 100 bateaux avec 1 000 soldats à bord, commandée par Okgna Vibol Rap, partit en premier comme force d’avant-garde,

- Une flotte de 50 bateaux avec 500 soldats à bord, commandée par Okgna Baratès Reach, formait l’aile gauche,

- Une flotte de 50 bateaux avec 500 soldats de l’eau à bord, commandée par Okgna Reachea Barakreach, formait l’aile droite,

- Une flotte amirale de 100 bateaux avec 1 000 soldats à bord, commandée par Okgna Kralahome.

 Cette armada quitta Phnom-Penh pour aller s’établir une base fluviale à Preak Rokakaug. Au même moment, le premier corps d’armée fut immédiatement envoyée pour intercepter les ennemis à la porte de Kampong Siem, laquelle fut composée de 4 divisions d’intervention rapide :

- une division d’avant-garde de 10 000 hommes, commandée par Okgna Chakrey,

- une division de droite de 6 000 hommes, commandée par Okgna Vongsa Akakreach,

- une division de gauche de 6 000 hommes, commandée par Okgna Reach Tekchak,

- une division d’arrière-garde de 6 000 hommes, commandée par Okgna Ya Norintryne Thipadey.

 Le deuxième corps d’armée composée de deux divisions lourdes : une division de 10 000 hommes, placée sous les ordres Okgna Yomreach, laquelle avait pour mission d’attaquer les ennemis à partir de Prey Chamcar. La deuxième division de 10 000 hommes, commandée par Samdech Chao Ponhea Yauthir Norin, partit de Longveak pour barrer la colonne d’ennemis à l’Est de Kompong Siem.

 Preah Chanreachea, à la tête de 2 000 soldats d’élites de sa garde prétorienne, suivit la marche des deux corps d’armée. À cette époque, presque l’ensemble du territoire de l’Est fut inondé par la crue du fleuve du Mékong. La marche de l’armée rencontrait beaucoup de difficulté. Le premier corps d’armée atteignit la porte de Kompong Siem, après 17 jours de marche. La citadelle fut pris, après 16 jours d’assaut par 40 000 hommes de l’armée de Kan contre 10 000 hommes de la garde provinciale de Chanreachea. Le gouverneur de Kompong Siem put s’échapper à la justesse de ces assauts d’ennemis. Il vint à la rencontre de son roi pour informer celui-ci de la prise de sa forteresse par les ennemis. Le roi l’assura que cet échec n’était pas de sa faute. Le renfort arriva en retard à cause de l’inondation. Le lendemain matin, Chanreachea ordonna à ses généraux d’attaquer les ennemis pour libérer le fort. Le général Yomreach de l’Ouest mena l’assaut foudroyant contre la division de Lompaing de l’Est. Vers l’après midi, Yomreach ordonna à ses troupes de battre en retraite. Il fut poursuivi de près par Lompaing. À Siem Boye, celui-ci fut surpris par les attaques coordonnées de sa gauche et sa droite par les troupes de l’Ouest dont le Général Vongsa Akarreach était à la commande. Lompaing ordonna à ses troupes de se retirer à 35 Sèn (1 Sèn = 30 mètres) de Siem Boye. Encore une fois, il fut attaqué à nouveau par les troupes d’ennemis dont le chef n’était que Chanreachea en personne. Sur sa monture avec son cornac, celui-ci coordonna la contre-attaque de ses troupes avec vivacité. Mais son destin fut lié à celui de son ennemi royal, futur roi du Kampuchéa par le choix du ciel. À la vue de Chanreachea sur sa monture, les soldats de Lompaing commencèrent à perdre toute assurance d’être soldats. L’instinct de peur en tant que petit peuple surgit dans leur esprit qui paralysa les forces de bras de combattant.  Pendant un laps de temps, ils laissèrent tomber leurs armes et se mirent à genou devant l’Auguste Royal en lui demandant la soumission et le pardon. Lompaing et son adjoint Chao Ponhea Yauthir Thipadey observèrent cette scène avec stupéfaction. Après quoi, ils s’enfuirent dans la forêt pour se suicider. Leur corps fut retrouvé par les soldats de Chanreachea. Ceux-ci coupèrent les têtes de ces deux généraux malheureux pour les apporter à Chanreachea. Celui-ci ordonna à ses soldats d’exposer les deux têtes sur la place publique. Après cette victoire, Chanreachea ordonna à ses troupes d'assiéger la citadelle de Kompong Siem. En quelques heures seulement, ses troupes arrivèrent à percer la défende d’ennemis, ils pénétrèrent dans la citadelle en vigueurs et libérateurs. Les soldats de l’Est, s’enfuirent pour embarquer à bord des bateaux et pirogues de guerre pour sauver leur vie. Le nombre de bateaux était insuffisants par rapport au nombre de fuyards, mais tout le monde voulait absolument monter à bord des embarcations : Les uns poussent les autres pour avoir une place à bord de pirogue surchargée. Ceux qui ne pouvaient pas monter à bord, cherchaient une petite espace à bâbord et tribord du bateau pour y accrocher leurs mains. Certains bateaux ne supportaient pas le poids des humains en excitation extrême à bord se renversèrent et provoquèrent le naufrage. Ceux qui ne savaient pas nager furent emportés par le courant du fleuve en colère. Il y avait beaucoup de morts dans cette débâcle, parmi lesquels il y avait Ponhea Moha Séna, commandant de la citadelle.

 Ayant appris la défaite, Kan lança une contre attaque. Le général Sral et le Général de l’eau Vibol Reach furent chargés de reprendre la citadelle de Kompong Siem. Cependant, la flotte de l’armée de l’Ouest quitta sa base de Rokakaug pour mesurer à celle de Vobol Reach de l’Est. Arrivé à la commune d’Angkor, le Général Kralahom, commandant de la flotte de l’Ouest, avait vu une centaine de pirogues de l’armée de l’Est dans un port improvisé. Cette flotte état gardée seulement par 1 500 soldats. Kralahome ordonna à ses troupes de les emparer immédiatement. Cet abordage surpris fit fuir un grand nombre d’entre eux. Le trophée de cette bataille improvisée était impressionnant : 150 pirogues de guerre saisies et 800 soldats de l’Est demandèrent la soumission. Ayant appris cette nouvelle, Sral et Vibol Reach s’immergeaient dans le désespoir. Cette perte se propageait vite dans le corps des officiers. Elle se transforma en une panique générale dans les rangs de soldats. Entre quelques heures seulement les troupes de Sral et Vibol Reach se décomposaient en bande de déserteurs. Sral et Vobol Reach et beaucoup des officiers décidèrent de se suicider par noyade. Kralahom fit 500 prisonniers de plus dans cette débandade sans bataille. Mais, elle ne décourageait pas Kan. Il ordonna à nouveau à ses généraux Pich, fils de Kao, Krès, fils de Lompaing et Koy, fils de Vieng de conduire une armée de 20 000 hommes pour attaquer la citadelle de Kompong Siem.

 Cette campagne se prolongeait plusieurs mois, sans vainqueur, ni vaincu. Pendant la saison de pluie, ces deux armées s’attachaient alors à appliquer leur accord de trêve pour laisser les paysans de cultiver du riz. Profitant de cette accalmie, Kan se méditait pour trouver une nouvelle stratégie. Après concerté avec ses conseillers, Kan décida de demander la paix à Chanreachea en proposant au dernier la séparation le pays en deux États indépendants. Il envoya donc une ambassade composée de trois ministres plénipotentiaires, Chao Ponhea Sangkram Keo, Ponhea Rasasambath Em et Preah Chumnygn Avuth Kam pour porter une lettre au Roi de l’Est. L’ambassade quitta la capitale Pichay Norkor par voie fluviale. Elle remontait le Mékong à destination Kompong Siem. Arrivé au niveau de Peam Chi Kang, le convoi des légats fut attaqué par la patrouille fluviale de l’armée de l’Est. Au cours de l’assaut surpris, le chef de la délégation Keo fit tomber le tube en or dans l’eau, dans laquelle, il y avait la lettre de Kan. Les membres de l’ambassade furent capturés et amenés au quartier général de Preah Chaneachea. Ayant appris que ses soldats avaient attaqué le convoi de l’ambassade, celui-ci ordonna à ses officiers de punir immédiatement tous ces saillants de 24 coups de fouets au dos, parce que leur attaque était une transgression à loi de la diplomatie. Ensuite, il accorda une audience royale aux membres de la délégation de Kan. À genou devant Preah Chanreachea perché à un mètre de la terre sur son lit royal, l’ambassadeur Keo informa l’Auguste Roi que la lettre de son roi était tombé dans le fleuve pendant l’assaut des soldats, mais il connaissait une grande partie du contenu de cette missive. Sans perte le temps, Chanreachea dit à Keo de lui informer les intentions de Kan. Keo lui dit à haute voix la proposition de son Roi. Ayant entendu ce projet, Chanreachea assena une réplique à ces idées malfaisantes : « Le Kampuchéa est le pays de mes ancêtres. Je suis donc l’héritier légitime de leur trône. L’unité du pays est une pierre angulaire de mon action. Est ce que trouves-tu normal qu’il ose me proposer cette solution ? Ma réponse est non. Tu diras à Kan, s’il voulait prolonger la trêve au-delà de la saison de culture du riz, il n’ait qu’à retirer ses troupes du territoire de l’Est, mais une des deux parties réserve le droit de rompre la trêve à n’importe quel moment ». Glacial il conclut : « De toute façon, AKan n’est qu’un voleur éhonté, il ne mérite pas d’être, ni un ami, ni un membre de ma famille. Il faut AKan sache que tout ce qui est possible pour lui est impossible pour moi ». 

 Retourné à Pichay Norkor, Keo informa son roi tous les propos de Preah Chanreachea. Ayant entendu ces insultes, Kan s’en indigna. Pour reprocher à son ambassadeur de ne pas répondre cette injure, il fit une circonlocution dont il usait quand il était découragé : « Bien sûr que tu n’as pas eu droit d’en conteste en tant qu’ambassadeur d’un Royaume le plus civilisé de la région. Ton comportement est irrépressible ».

 Après quoi, Kan ordonna à ses généraux d’évacuer tous ses troupes du territoire de l’Est. Il renforça deux bases militaires importantes : Preak Pou et Mouth Khoum. Après ce retrait, Chanreachea retourna à Pursat pour se reposer après une longue campagne militaire. Quelque temps après, il ordonna au ministre de la guerre d’organiser un concours général pour recruter des meilleurs officiers de son armée. Les gagnants du concours auront des récompenses de grade d’officier dans les Armées Royales.

 En 1520, la reine donna un enfant au Roi. Ce dernier porta le nom royal Rama Thipadey. L’année suivante, 1521, la première dame, Bothom Bopha, donna aussi un fils au roi. Il porta le nom royal Borimin Reachea. Le Roi aimait éperdument ses deux enfants.



[1] (1) Cette se trouverait dans la province de Prey Veng. Elle se situerait à Bak Dav, non loin de Kompong Popil. 

[2] (2) Phkak’k : une sorte de couteau.

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