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15 octobre 2009 4 15 /10 /octobre /2009 13:15

Aperçu sur l’évolution de la presse au Cambodge (Suite et fin).

Avertissement : Auteurs : MM. Soth Polin, Directeur du journal Nokor Thom, et Sin Kimsuy, chargé de cour à la Faculté de Droit et des Sciences Economiques. Ils ont écrit cet essai en langue française en 1974 et publié en février de la même année.

II. Presse et Gouvernement

Code de Presse.

À l’instar de la presse libérale de l’occident, dont elle s’est largement inspirée, la presse khmère d’aujourd’hui se veut une presse d’opposition. Mais la tâche n’a pas été facile.

En juin 1972, le Ministère de l’Information a publié un code de presse fort sévère qui apparaît aux yeux des journalistes comme épée de Damoclès.

Il est écrit dans le code que la presse est libre mais qu’elle ne doit pas porter atteinte à l’honneur des personnes, à la sécurité nationale, aux bonnes mœurs. L’honneur des personnes, c’est celui se rapportant à la dignité des individus et surtout à leur vie privée (article 2 et 21). Seulement au Cambodge les tenants du pouvoir acceptent difficilement de distinguer leur responsabilité publique et leur vie privée. Quand la presse s’en prend à un haut fonctionnaire pour affaire de corruption, par exemple, ce dernier réagit invariablement en l’accusant de proférer des attaques personnelles, mesquines, visant à ruiner sa réputation.

L’atteinte aux bonnes mœurs et à la sécurité nationale non plus n’est pas clairement expliquée. On ne saurait connaître dans une juste proportion, la limite qui sépare le permis et le défendu. Les journalistes doivent savoir eux-même s’adapter aux circonstances, flairer l’atmosphère, s’auto-censurer les termes pour ne pas aller trop loin. Les dangers peuvent surgir à chaque instant : on risque de trouver, chemin faisant, la prison ou la ruine sans parler de la vengeance des puissants. C’est ainsi que la maison du directeur du journal Nokor Thom a reçu le 9 janvier 1972 une charge de plastic pulvérisant sa voiture, parce que le journal s’est permis de ridiculiser un politicien lié intimement à un très puissant général, et M. Vath Van, l’un des directeurs de publication du journal Khmers-Ekareach, a reçu un coup de hache pour s’être moqué de la même personne.

Dans l’article 22 du code de presse, il est spécifié que la presse peur critiquer librement la politique et l’action du gouvernement. Mais cette critique ne doit pas être injurieuse. La critique qui n’est pas accompagnée d’injures mais « faite de mauvaise foi pour entraver l’action gouvernementale ou de la justice » n’est pas de même, autorisée.

Dans l’article 32, il est interdit de servir de la presse pour outrager.

« a/ Le Président de la République, le Vice-Président de la République, les chefs et les membres du clergé bouddhique des deux ordres ;

b/ Le Chef de l’Eat, ambassadeur, le chargé de mission ou le consul des pays entretenant des relations diplomatiques avec ma République Khmère ;

c/ Les députés, les sénateurs, les membres du Gouvernement, les membres de la Cour Suprême, du Conseil Supérieur de la Magistrature, de la Cour Constitutionnelle, de la Haute Cour de Justice et de tous les autres corps constitués, les agents des services administratifs, les militaires ou les citoyens chargés provisoirement ou habituellement d’un mandat administratif ou électoral, en ce qui concerne les activités intéressant la mission ou la fonction des intéressés ;

d/ Les personnes privées, qu’elles soient des individus privés ou des entités légales ;

e/ Les personnes décédées dans le but de porter atteinte à l’honneur et au prestige des héritiers, conjoints ou mandataires qui sont encore vivants.

Est réputé outrage tout terme méprisant ou injurieux ».

On voit bien la marge étroite de manœuvre pour un journaliste qui essaye d’accomplir convenablement sa tâche, puisqu’il ne peut blâmer personne. L’outrage, le mépris ou l’injure, ce sont des termes vagues et généraux pouvant être interprétés de différentes façons. Un journaliste sera donc condamné ou gracié selon le bon vouloir de l’autorité. En somme, il faut essayer de faire des éloges à tout le monde. Ce qui s’avère ridicule, car quand les choses se passent honorablement ou bien sont normales, on sent l’inutilité de les relater dans la presse : Comme un chien qui mord un homme, alors qu’on ne doit pas manquer de faire si c’est l’homme qui mord le chien.

Diffamation :

Les procès intentés contre la presse pour diffamation sont employés par les hommes occupant de hautes fonctions ou par le gouvernement lui-même pour faire reculer les journalistes. Pourtant des hauts fonctionnaires, dans leur plainte devant le tribunal devient souvent du problème soulevé. Pour se disculper aux yeux de l’opinion, ils soulignent à n’en plus finir leur compétence, grossissent le bon accomplissement de leur travail, mais ils s’abstiennent de répondre coup pour coup aux accusations portées contre eux, c’est-à-dire de se justifier. Ils contre-attaquent globalement en répétant que la presse les diffame, par exemple, ou « qu’elle travaille pour les communistes ». Et ils visent, guettent un point faible dans les mots, cherchent une défaillance, une négligence dans les termes employés par les journalistes pour les prendre à la gorge. C’est à croire qu’ils cherchent les fautes de grammaire.

Du temps de l’absolutisme du prince Sihanouk, en 1969, le journal Sovanphoum (le village d’or) a été condamné à une forte amende (104 000 Riels = 2 080 dollars à l’époque) pour avoir diffamé M. Kou Roun. Sa faute de l’avoir appelé « Asora », l’orgre.

Le Prince Sihanouk en personne, en tant que Chef de l’État avait porté plainte pour diffamation contre M. Sim Var, directeur et propriétaire de Khmer Ekareach, en septembre 1969, Monsieur Sim Var avait alors publié un éditorial passionné appuyant le nouveau gouvernement dit de sauvetage nommé pourtant par Sihanouk lui-même, afin « qu’il mette un terme à l’anarchie, au désordre social et à la corruption qui minent le pays alors que les étrangers sont en train de l’envahir ». (le journal Khmer Ekareach du 17 septembre 1967 – bibliothèque nationale Phnom-Penh).

C’était cette dernière phrase qui avait été incriminé. En réalité Sihanouk a été rendu fou de colère par un autre article paru le jour suivant accusant M. Khek Vandy, Président Directeur Général de plusieurs sociétés d’État et en même temps ami de Mme Monique Norodom II, de corruption. Sihanouk demandait seulement un riel de dommage et intérêts à Sim Var, s’il gagnait le procès. La tension était si grande que la Reine Kossomak, mère de Sihanouk, le Président du Conseil des Ministres Lon Nol et le Président de l’assemblée Nationale Cheng Heng, conjuguaient leurs efforts pour demander à Sim Var d’assouplir sa position. Sim Var avait dû saborder son journal en octobre 1969.

En 1971, M. Thon Ouk, Président Directeur Général de la société khmère de raffinerie de pétrole porte plainte contre le journal Nokor Thom qui a étalé au grand jour avec documents à l’appui, la gestion défectueuse de cette société d’État qui comportait un gaspillage monstre et causant une perte de cent onze millions de riels rien qu’en 1970. Mais Thon Ouk insistait plutôt sur les termes employés par le journal, par exemple : « Il (Thon Ouk) leur est si servile que c’est à croire qu’il leur apportait de sa propre main du papier hygiénique »…Néanmoins le tribunal de première instance a acquitté le journal Nokor Thom.

Mme Ung Mung aussi, ancien ministre de tourisme, a intenté un procès de diffamation contre le journal Nokor Thom, procès qui traîne jusqu’aujourd’hui, pour l’avoir appelée une cuisinière, et le ministère du tourisme Samlâr Kâkor, une soupe khmère aux divers ingrédients. Les critiques sérieuses étaient méconnues par le ministre.

Violation de la liberté de presse.

Le code de la presse conçu sans la participation des journalistes, constitue déjà à lui seul une violation de la liberté de presse. Comme l’a fort justement observé M. Sim Var, si ce code ne permet pas de critiquer et de blâmer nos gouvernements, ces « princes » que le peuple paie de ses derniers, c’est qu’il n’est ni plus ni moins un système de dictature.

Mais il y a eu aussi tout au long de l’histoire de la presse khmère des violations sur les personnes et les biens des journalistes qui sont allés jusqu’à assassinat. Un directeur du journal Pracheachon (tendance communiste pro-Hanoï) du nom de Nop Bophan a été tué à bout portant dans la nuit du 9 Octobre 1959, immédiatement au nord de la pagode Laing Kar, par un inconnu (que la rumeur publique disait être un agent de Sihanouk). Le docteur ès sciences économiques Khieu Samphan, progressiste, nouvellement diplômé de Paris, directeur d’un bi-hebdomadaire de langue française, « Observateur », a été mis à nu et torturé par M. Kou Roun, ministre de Sécurité de Sihanouk en avril 1960 :

« Le 13 avril 1960, alors qu’il circulait en motocyclette devant la maison de M. Lim Kry, non loin de la police Preah Sihanouk, M. Khieu Samphan se vit molesté par une bande d’assaillants qui n’étaient autres que des agents de police du gouvernement. Tout le monde le savait et Khieu Samphan s’en indigna en publiant des articles accusateurs contre la Police. Kou Roun le manda à son bureau et frappa de sa propre main, avec le -Kdâr Ko- (verge du bœuf), le jeune et brillant docteur jusqu’à ce que ses sphincters lâchent des excréments, son ancien tortionnaire. ».

On aurait dit, il commit le crime de publier des articles élogieux envers les petits vendeurs de pain, mettant ainsi en relief la lutte des classes dans le « Sangkum » de Sihanouk. En 1958, un très célèbre écrivain, Sang Savath (Sang Savath, camarade de classe de Hang Thou Hak et de Hou Youn, était un puissant romancier par la vigueur et l’apreté de son talent). Il publia en 1955 « Moha Chaur neou toul dèn » (Les pirates de la frontière), et « Décho Kraham » (Le Seigneur rouge), directeut du journal Khmer Thmei, partisan du gouvernement Khmer Sérei de M. Son Ngoc Than (Khmer libre) aurait été liquidé sur la montagne Kirirom.

En 1967, une manifestation est provoquée par l’entourage même du prince Sihanouk pour détruire les locaux du journal et de l’Imprimerie de Khmer Ekareach. Les dégâts ont été énormes : 3 Millions de riels qui équivalaient à l’époque 60 000 dollars.

Après le 18 mars 1970, la répression contre les jouranistes, bien que nettement moins sauvage, ne s’est pas relâchée pour autant. Plusieurs journalistes ont été mis en prison sans jugement, comme M. Bouy Sréng, directeur du journal Sankruoh Khmer (Sauver les Khmers) en juillet 1972. De façon générale si les journaux ont eu le malheur de déplaire au gouvernement, il les suspend. La suspension peut être provisoire ou définitive. Pour cela, la guerre contre les envahisseurs est un bon prétexte qui vient à la rescousse du gouvernement défaillant.

Le journalisme comme tremplin.

En somme, le journalisme au Cambodge s’est révélé un métier harcelant, dévorant, un exercice quotidien de haute acrobatie. Les journalistes sont pareils aux danseurs de corde : les dangers viennent de tous les côtés, danger de s’arrêter en route, de regarder en arrière, danger d’avoir peur de la peur. S’ils se mettent au pas, derrière le gouvernement, leurs journaux ne trouveraient pas d’audience et financièrement, ce sera une catastrophe. S’ils se font les champions de l’intérêt public, ils perdent des amis, s’exposent au courroux des hommes au pouvoir qui ne manqueront pas de leur tordre le cou. Quand le tirage d’un journal monte vite, ce n’est guère un signe de santé et de prospérité, c’est plutôt un symptôme qui indique qu’il ne va pas loin. Un journaliste de talent, respectueux de sa profession, n’a pas d’avenir personnel.

Pourtant au Cambodge le journalisme mène aussi très loin, à condition d’en sortir. Plusieurs journalistes : MM. Trinh Hoanh, Chau Seng, Tep Chhieu Kheng, Kem Reth, Khung Thay Ly etc. Trois ont pu devenir dans le temps Premier ministre : MM. Son Ngoc Thanh, Sim Var, Long Boret. Certains d’entre eux, il est vrai, oublient très vite leur ancien métier.

III. Les facteurs socioculturels et la presse.

Depuis la nationalisation de la presse au Cambodge, décidée par l’ancien régime en fin 1967, les journaux privés ne sont plus autorisés à ne paraître qu’en langue nationale : le Khmer. La presse gouvernementale par contre est publiée dans quatre langues : le Khmer, le Français, l’Anglais et le Chinois. Les journaux en Khmer sont plus nombreux que ceux qui sont publiés dans les trois langues. Le nombre de tirages des journaux gouvernementaux en français et en chinois etc. plus important que celui des journaux en anglais. Ceci s’explique par plusieurs raisons. D’abord, considéré comme deuxième langue, le français est encore utilisé dans l’Administration avec le Khmer. Les fonctionnaires, les enseignants et les étudiants constituent le seul marché de lecteurs des journaux en français, dont le nombre se trouve maintenant réduit avec la politique de « Khmérisation » de l’enseignement entreprise par le gouvernement depuis 1967. Ensuite, l’existence des journaux en langue chinoise explique l’importance du nombre des Chinois sont l’immigration au Cambodge remonte assez loin dans l’histoire nationale. Sur une population totale de 7 millions environ, le Cambodge compte 350 000 à 400 000 Chinois. Dans les villes et dans les autres centres urbains, un homme sur cinq ou six est Chinois, parle, pense et vit à la chinoise. Cette population d’origine de « l’Empire du milieu » et qui vit toujours en société ou, en congrégation, éprouve, partout où elle sera, le besoin de s’informer, de communiquer entre ses compatriotes. Sa vocation et ses aptitudes manifestes pour le commerce trouvent en la presse l’excellent moyen pour traiter ses affaires. Deux remarques s’imposent : d’abord, les Chinois lisent plus, que les Cambodgiens et généralement chaque maison chinoise abonne un ou deux journaux chinois qui la mettent au courant de toutes les nouvelles commerciales du jour et de la situation économique générale du pays ; ensuite, la presse chinoise sert plus les intérêts des Chinois que ceux des Cambodgiens, car ces derniers ne comprenant pas le chinois, elle constitue un mystère, voire un code secret pour la population khmère. Et au lieu d’assurer l’intégration sociale des Chinois dans la société khmère, la presse en langue chinoise favorise au contraire une cloison étanche entre ces deux sociétés en permettant à la première de prendre conscience de sa particularité et de sa prédominance vis-à-vis de la seconde.

Les autres groupes sociaux et religieux comme la minorité vietnamienne et la communauté Cham n’ont que des rapports vaguement déterminants avec la presse du pays ; ils n’ont pas leurs journaux propres.

Les journaux gouvernementaux en langue anglaise (ils sont au nombre de deux) sont d’une date récente et ne touchent qu’un public très limité.

Contenu des journaux moyens.

Sauf « Nokor Thom » et « Républicain » qui ont 8 pages chacun, mais de format tabloïd, les quotidiens cambodgiens sont en général de quatre pages. La première et la quatrième page sont consacrées aux éditoriaux, aux nouvelles du pays, à celles de l’étranger, et à quelques articles d’études des problèmes touchant la réalité du pays et l’intérêt général. Les informations intérieures comprennent les activités du chef de l’État, du Premier ministre ou des membres du gouvernement, les communiqués de différents départements, les affaires civiles ayant trait aux actes de corruption sous toute leur forme et quelquefois le droit de réponse. En général, les articles importants sont illustrés des photos ou des caricatures vexatoires. Il y eut cet effort d’adaptation de la presse aux nouvelles aspirations des lecteurs ; le phénomènes inverses se produisit également : l’adaptation des lecteurs à la nouvelle tendance de la presse. C’est donc cette adaptation mutuelle de la presse et des lecteurs, phénomène social nouveau, qui fait progresser la presse khmère dans son ensemble. Il s’ensuit que le genre d’articles qui avaient pu plaire au public d’avant 1970, sont maintenant très mal vus par la majorité des lecteurs d’aujourd’hui. Les réclames publicitaires ne figurent presque jamais à la première page qui est plus politique que commerciale. Surtout les nouvelles de guerre occupent une grande partie des informations locales pendant ces dernières années. La presse publie chaque jour les nouvelles provenant des champs de bataille rédigées par leurs reporters, et les communiqués de l’Etat-major des forces militaires nationales. Mais ce sont surtout les commentaires politiques dont les thèmes se rapportent généralement aux affaires du pays qui permettent d’apprécier ce que valent exactement les journaux au Cambodge. Les textes d’études et d’analyse ne se rencontrent que dans très peu de quotidiens et hebdomadaires. À titre d’exemple, on peut citer les journaux « Nokor Thom », « Khmer Ekareach » et le « Bulletin de Jeunesse », qui se sont donnés de l’effort dans l’analyse des faits économiques, politiques, sociaux ou historiques du pays.

Les pages intérieures sont d’ordinaire réservées aux choses moins urgentes ou d’importance secondaire : les romans nationaux ou traduits de l’étranger, y ont traditionnellement occupé une place majeure. Il s’agit des romans de tout genre : Classique ou moderne, du sentimental au philosophique. Les analyses scientifiques et historiques y ont également leur place et sont recherchées surtout par le public intellectuel, universitaire, étudiant et fonctionnaire. C’est par ce genre de travail que la presse cambodgienne d’aujourd’hui peut avoir son rôle positif qu’elle n’avait pas, naguère.

Les lecteurs.

Les lecteurs se divisent en plusieurs catégories selon leur goût et leur intérêt, par exemple celle qui s’intéresse aux nouvelles fraîches, celle qui recherche les analyses intelligentes et profondes des faits économiques, politiques et sociaux, et celle qui est gagnée au sensationnel. La première catégorie de lecteurs est formée des commerçants, des hommes d’affaires qui composent la classe d’entreprenante du pays. La seconde représente l’«intelligentsia » regroupant professeur, étudiants, fonctionnaires. La troisième catégorie englobe la majorité des lecteurs dont le niveau d’instruction reste bas. Elle a fourni l’occasion à certains journaux peu scrupuleux et irresponsables d’exploiter leur penchant vulgaire en vue d’augmenter le tirage. Cependant, on constate que la 2e catégorie de lecteurs augmentent d’année en année, alors que les lecteurs de la 3e catégorie diminuent progressivement, parallèlement au progrès de la conscience nationale de la presse.

Conclusion.

Dans son ensemble, la presse au Cambodge reste une presse de combat. Elle est plus politique que commerciale ou que technique. Même le rôle d’information vient après. L’apparition de la plupart des journaux coïncide avec les moments les plus bouillonnants de la politique du pays. Leur sort est en général lié au développement des circonstances politiques qui les ont vus naître. Leur vie n’a pas connu de stabilité et par conséquent leur influence politique n’a jamais été durable dans le passé. Cependant, quelques journaux ont pu, par leur prestige et leur talent, par l’impact de leurs articles sur l’opinion publique, influencer le cours des évènements d’importance historique : il s’agit des journaux « Nagaravatta » à l’époque qui précède l’avènement de l’Indépendance, et « Khmer Ekareach » à la veille de l’évènement du 18 Mars 1970. Depuis 1970, malgré leur existence éphémère, les journaux privés au Cambodge ont profité de la période de liberté brève et relative octroyée par le nouveau régime en place en pleine transmutation, pour jouir de son nouveau rôle de 4e pouvoir. Mais la suppression de tous les journaux par le gouvernement désormais méfiant du rôle de la presse, depuis le 18 Mars 1973, ait mis fin peut-être définitivement à cette liberté naissance. Ceci a permis de conclure qu’au Cambodge, en tout temps, la participation de la presse à la direction des affaires de l’État n’a été, en effet, tolérée que lorsque les autorités espéraient y trouver total appui et obéissance aveugle aux grandes lignes politiques du gouvernement. Dans cette liberté conditionnelle et contrôlée, pour se maintenir à la surface bon nombre de journaux se voient obligés de vivre l’opportunité des circonstances. Toutefois, cette faiblesse et cette instabilité du rôle politique de la presse khmère peuvent également s’expliquer par le fait qu’une partie des journaux qui ne sont pas dignes de ce nom, leur manque d’organisation et de sérieux les empêchent de devenir une institution efficace pouvant se défendre contre la pression éventuelle du gouvernement.

Quant à son rôle d’information, la presse privée khmère, n’a qu’à moitié réussi, malgré un certain progrès qu’elle a connu depuis ces derniers temps. N’ayant au départ aucune formation professionnelle, les journalistes cambodgiens, qui se sont lancés dans le métier, animés en général d’un enthousiasme politique, dans l’espoir de le mener à bien et l’améliorer plus tard par la pratique sur le terrain qui leur restait jusqu’alors vierge. Reportages souvent mal fait, retard des nouvelles s’ajoutant à la pauvreté en articles scientifiques et en articles d’études, et au manque de moyens techniques indispensables à la bonne marche d’un journal, voilà les causes qui expliquent l’insuffisance de la presse khmère en tant qu’institution sociale et son retard sur la presse des autres pays. Remédier à ces insuffisances et faire prendre conscience aux journalistes khmers de l’importance de leur rôle dans la contribution effective à toutes les fonctions de l’État, administratives, économiques, politiques et sociales, devient indispensable et urgente pour permettre à la presse khmère de devenir une institution utile pour tous, et de survivre.

Note : Nous n’avons pas transcrit le chapitre « Aspect économiques de la presse khmère », parce que nous jugeons qu’il ne représente que l’aspect technique, économique et organisationnel de la presse khmère de l’époque. Dans ce chapitre les auteurs ont traités les sujets suivants : Facilités de création du journal, Capital, Répercussion sur la consommation, Distribution, Autres aspects (crise de papier, les machines).

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